Chroniques d'un ACTE en retour
Chroniques d'un ACTE en retour
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Samedi 17 février 2024
7h, peut-on commencer un récit par une liste de courses ? J’en fais la tentative car j’ai décidé que cette courte résidence en Martinique serait culinaire. En parallèle à cette préméditation j’ai construit et affiné le déroulé de ma nouvelle performance présentée le samedi 24 et le dimanche 25 février Sa sé manifest, sa sé manifestation dans la commune de Sainte-Anne dans l’extrême Sud de la Martinique. Cette performance inscrira dans l’espace comment le continuum colonial et la perdurance du Plantacionocène se formulent aujourd’hui en Guadeloupe et en Martinique. J’ai vraiment hâte de rencontrer le danseur avec qui je vais collaborer. Cela se fera lundi à 17 h.
Hâte aussi de fouler la terre, le sol de la Martinique. Je n’y avais pas été invité depuis 2011. Cette année là c’est mon ami José Manuel Noceda, le curateur cubain, qui m’avait invité. Comme je ne voyage que pour mes projets artistiques, je suis resté 13 longues années sans retourner en Martinique. Pourquoi n’ai je pas été invité chez moi ? J’y reviendrai peut-être.
J’atterris à 15h55 à l’aéroport Aimé Césaire au Lamentin. Aura t’on le temps demain soir de faire des courses ? Les hypermarchés sont ils ouverts le dimanche soir? Nous irons probablement faire les courses dans la commune voisine du Marin.
Animaux
Vivaneaux frais
Crevettes (curry rouge et accras)
Chatrou (pieuvre)
Morue salée émiettée (chiquetaille de morue et accras)
Cuisses de poulet (curry vert)
Cabri (colombo)
Salaisons de porc, queue et groin (haricots rouges)
Légumes et fruits :
Citrons verts (pour faire mariner le poisson, entre autres)
Christophines (pour le curry vert et le colombo)
Poivrons verts et rouges (curry)
Harricot verts frais (curry vert)
Concombres
Avocats
Laitue
Tomates
Pommes de terre
Mangues vertes
Ail
Oignons
Oignons pays
Persil
Piments bondamanjak
Piments végétariens
Pour le court bouillon :
Tomates pelées
Concentré de tomate
Huile
Bouquet garni
Feuilles de bois d’Inde
Clous de girofle
Beurre rouge (roucoux, paprika)
Pour le colombo de cabri :
Poudre de colombo de la Guadeloupe (achetée à Paris)
Pour les accras :
2 L d’huile de tournesol
Farine
Vinaigre blanc
Bicarbonate de sodium (acheté à Paris)
Sauce piment en bocal (aussi, en acheter pour Shaka)
5 kg de riz parfumé thai
Haricots rouges
Pour le petit dej :
Pain aux céréales
Oeufs
Emmental râpé
Aussi chiquetaille de morue et accras
Cristalline (zéro chlordecone) additionnée de citrons verts
Rhum Neisson pour les buveurs d’alcool
Sucre de canne Le Galion
Dimanche 18 février, 23h55
Il est bientôt 5 h du matin, heure de Paris. Premier réveil, j’espère pouvoir me rendormir. Je suis logé à Sainte Anne dans un lotissement constitué de maisons où au diner j’ai dû mettre mon shatta, mon Kalash, mon Akiyo et mon Mona en sourdine. Les habitations occupées par des touristes sont séparées de quelques mètres. Avec, en 2021, Charles à Mayotte on ne mesurait pas la chance d’être logé chez l’habitant entouré de bangas-tôle. On pouvait se réveiller avec le dernier album de Kalash, à fond. Une merveille. Je m’étais imaginé à Paris faire raisonner la cuisine puis nos repas de musique. Il en sera autrement.
Avec l’artiste plasticien réunionnais Thierry Fontaine, nous avons atterri à 15 et 16h après plus de 8h de vol. C’est l’artiste plasticien Bruno Creuzet qui est venu à notre rencontre. En descendant de l’avion j’ai écrit à Alexandre Tharaud « je suis sur mes terres, je suis heureux ». Il m’a répondu par un « Tu vois ». Dès la passerelle en sortant de l’avion, j’ai reconnu l’air de la Martinique. J’ai vécu sans, comme en apnée, depuis si longtemps. Dans la voiture, j’ai été parlé par la moindre feuille sèche se décrochant de l’arbre à pain, par le courant d’air dans les volutes de bambou. Les crabes de terre au fond de leur trou, les poules, poussins et coq piétinant le feuillage, les chats guettant les oiseaux, tout cela je le percevais. 13 années d’exile me revenaient aux tympans.
Ça me fait plaisir de retrouver Thierry et l’artiste plasticienne de la Martinique Louisa Marajo. Nous nous connaissons et étions tous trois invités à Marseille il y a trois semaines. Une autre artiste, guyanaise, Tabita Rézaire que je ne connais pas se joint à nous ce soir. Je connais Thierry depuis 2004. En 20 ans, nous avons appris à nous connaitre. J’ai une immense estime pour son travail. Cela tombe bien, Thierry a envie de manger la cuisine de Martinique durant ce séjour. Pourquoi pas lui préparer aussi une fricassée de chatrou avec des haricots rouges ? Avec des salaisons de porc dans les haricots. Allez, je rajoute la pieuvre et les salaisons et les haricots à ma liste.
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Samedi 17 février 2024
7h, peut-on commencer un récit par une liste de courses ? J’en fais la tentative car j’ai décidé que cette courte résidence en Martinique serait culinaire. En parallèle à cette préméditation j’ai construit et affiné le déroulé de ma nouvelle performance présentée le samedi 24 et le dimanche 25 février Sa sé manifest, sa sé manifestation dans la commune de Sainte-Anne dans l’extrême Sud de la Martinique. Cette performance inscrira dans l’espace comment le continuum colonial et la perdurance du Plantacionocène se formulent aujourd’hui en Guadeloupe et en Martinique. J’ai vraiment hâte de rencontrer le danseur avec qui je vais collaborer. Cela se fera lundi à 17 h.
Hâte aussi de fouler la terre, le sol de la Martinique. Je n’y avais pas été invité depuis 2011. Cette année là c’est mon ami José Manuel Noceda, le curateur cubain, qui m’avait invité. Comme je ne voyage que pour mes projets artistiques, je suis resté 13 longues années sans retourner en Martinique. Pourquoi n’ai je pas été invité chez moi ? J’y reviendrai peut-être.
J’atterris à 15h55 à l’aéroport Aimé Césaire au Lamentin. Aura t’on le temps demain soir de faire des courses ? Les hypermarchés sont ils ouverts le dimanche soir? Nous irons probablement faire les courses dans la commune voisine du Marin.
Animaux
Vivaneaux frais
Crevettes (curry rouge et accras)
Chatrou (pieuvre)
Morue salée émiettée (chiquetaille de morue et accras)
Cuisses de poulet (curry vert)
Cabri (colombo)
Salaisons de porc, queue et groin (haricots rouges)
Légumes et fruits :
Citrons verts (pour faire mariner le poisson, entre autres)
Christophines (pour le curry vert et le colombo)
Poivrons verts et rouges (curry)
Harricot verts frais (curry vert)
Concombres
Avocats
Laitue
Tomates
Pommes de terre
Mangues vertes
Ail
Oignons
Oignons pays
Persil
Piments bondamanjak
Piments végétariens
Pour le court bouillon :
Tomates pelées
Concentré de tomate
Huile
Bouquet garni
Feuilles de bois d’Inde
Clous de girofle
Beurre rouge (roucoux, paprika)
Pour le colombo de cabri :
Poudre de colombo de la Guadeloupe (achetée à Paris)
Pour les accras :
2 L d’huile de tournesol
Farine
Vinaigre blanc
Bicarbonate de sodium (acheté à Paris)
Sauce piment en bocal (aussi, en acheter pour Shaka)
5 kg de riz parfumé thai
Haricots rouges
Pour le petit dej :
Pain aux céréales
Oeufs
Emmental râpé
Aussi chiquetaille de morue et accras
Cristalline (zéro chlordecone) additionnée de citrons verts
Rhum Neisson pour les buveurs d’alcool
Sucre de canne Le Galion
Dimanche 18 février, 23h55
Il est bientôt 5 h du matin, heure de Paris. Premier réveil, j’espère pouvoir me rendormir. Je suis logé à Sainte Anne dans un lotissement constitué de maisons où au diner j’ai dû mettre mon shatta, mon Kalash, mon Akiyo et mon Mona en sourdine. Les habitations occupées par des touristes sont séparées de quelques mètres. Avec, en 2021, Charles à Mayotte on ne mesurait pas la chance d’être logé chez l’habitant entouré de bangas-tôle. On pouvait se réveiller avec le dernier album de Kalash, à fond. Une merveille. Je m’étais imaginé à Paris faire raisonner la cuisine puis nos repas de musique. Il en sera autrement.
Avec l’artiste plasticien réunionnais Thierry Fontaine, nous avons atterri à 15 et 16h après plus de 8h de vol. C’est l’artiste plasticien Bruno Creuzet qui est venu à notre rencontre. En descendant de l’avion j’ai écrit à Alexandre Tharaud « je suis sur mes terres, je suis heureux ». Il m’a répondu par un « Tu vois ». Dès la passerelle en sortant de l’avion, j’ai reconnu l’air de la Martinique. J’ai vécu sans, comme en apnée, depuis si longtemps. Dans la voiture, j’ai été parlé par la moindre feuille sèche se décrochant de l’arbre à pain, par le courant d’air dans les volutes de bambou. Les crabes de terre au fond de leur trou, les poules, poussins et coq piétinant le feuillage, les chats guettant les oiseaux, tout cela je le percevais. 13 années d’exile me revenaient aux tympans.
Ça me fait plaisir de retrouver Thierry et l’artiste plasticienne de la Martinique Louisa Marajo. Nous nous connaissons et étions tous trois invités à Marseille il y a trois semaines. Une autre artiste, guyanaise, Tabita Rézaire que je ne connais pas se joint à nous ce soir. Je connais Thierry depuis 2004. En 20 ans, nous avons appris à nous connaitre. J’ai une immense estime pour son travail. Cela tombe bien, Thierry a envie de manger la cuisine de Martinique durant ce séjour. Pourquoi pas lui préparer aussi une fricassée de chatrou avec des haricots rouges ? Avec des salaisons de porc dans les haricots. Allez, je rajoute la pieuvre et les salaisons et les haricots à ma liste.
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