jean-françois boclé
Workshop - Practice

French below


Ordinary Chronicles of CENSORSHIP

Thursday, December 26, 2024
For 30 years, I have addressed violence in my work. So, I am not surprised to face it again and again. But breaking one, two, three, four ribs is extremely painful. Breathing then comes at a price. That is the price to pay for being an artist who expresses anger by taking the risk of being explicit. An artist can be violently implicit, just as they can practice the explicit. Are these two positions even reconcilable? Art allows so much.

It can be somewhat complex to embrace my aesthetics, my poetic/political voice, I am well aware of that. Yet now, I find myself having an exhibition shut down in a Latin American country with an authoritarian regime, a continent to which I feel so deeply connected. I write this manifesto in the wake of that. I write this manifesto in the wake, in the blows of that. I am not an artist to make exhibitions be shut down. I phrase it this way because I am proud to count among my friends an artist whose work was to have an exhibition closed. He makes impossible the calm that generally surrounds the mechanisms of display.

The explicit nature of violence, the explicit nature of domination, has been reproached to me time and again in the way I speak. For example, I have been asked to erase the words "colony," "colonization," "colonial," "decolonial" from my vocabulary. A Parisian gallerist threw this sentence in my face: "I am a little white guy who sells to little white guys, I can do nothing for you." This person had come to me, but without truly seeing my work. I was also simply told that I wasn’t an artist, that I didn’t have access to the complex, elusive nature of the world. All of this from the position of power in the art world—curators, gallery owners, art school professors. I’ve cannibalized this violence to make it into works of art. My works are my only compass in life.

I remain a polite boy, but self-censorship would gnaw at me, would corrode me, would necrotize me. Since childhood, I have irritated, I have stung. I was born under this light, I was born for this purpose. It can’t be torn away. I tried, and in doing so, I lost all capacity to breathe, all my internal flows turned into foul and unpleasant moods.

Self-censorship, a rogue word demanded from all sides in democracy—press here where it hurts—in autocratic or dictatorial regimes… Of course, self-censorship is part of speaking and (sur)viving, but I had to, a long time ago, draw a line through it.

I claim this, even though I have chosen not to name things. Yes. Not naming allows me to expose myself, without exposing myself to condemnation. Not naming also for the safety of the people involved.

TO BE CONTINUED:

In 2024, I was violently censored by one of France’s largest embassies abroad, with the argument that my work over the past 30 years tarnished the image of France. The consequence: I lost a five-year contract to promote and establish my work in the country’s largest museums, one of the greatest powers in the world.




















Chroniques ordinaires
de la CENSURE

Jeudi 26 décembre 2024
Depuis 30 ans, j’aborde la violence dans mon travail. Je ne m’étonne donc pas de me la prendre dans la figure encore et encore. Mais une, deux, trois, quatre côtes cassées est extrêmement douloureux. Respirer a alors un prix. C’est là le prix à payer pour être un artiste qui dit la colère en prenant le risque de l’explicite. Un artistique peut être violemment dans l’implicite comme il peut aussi pratiquer l’explicite. Ces deux positions sont elles d’ailleurs réconciliables ? L’art permet tant.

Il peut y avoir une certaine complexité à accueillir mon esthétique, ma poétique/politique, ma voix, j’en suis bien conscient, mais je fais maintenant fermer une exposition dans un pays au régime autoritaire d’Amérique Latine, le continent auquel je me sens tant relié. J’écris ce manifeste sous le coup de cela. J’écris ce manifeste sous le coup, sous les coups de cela. Je ne suis pas un artiste pour faire fermer les expositions. Je le formule ainsi car je suis fier d’avoir pour ami un artiste dont l’une des œuvres a été de faire fermer une exposition. Il rend impossible le calme qui entoure généralement les dispositifs de monstration.

L’explicite de la violence, l’explicite de la domination m’a tant été reprochée au fil du temps au niveau de mon dire. On m’a par exemple demandé d’effacer les mots colonie, colonisation, colonial, décolonial de mon vocabulaire. Un galeriste parisien m’a jeté au visage cette phrase : « Je suis un petit blanc qui vend à des petits blancs, je ne peux rien pour toi ». Cette personne était pourtant venue vers moi, mais sans voir en détail mon travail. On m’a aussi tout simplement dit que je n’étais pas un artiste n’ayant pas accès à la complexité fumeuse du monde. Tout cela du haut de position de pouvoir du monde de l’art, curateurs, galeristes, enseignants en école d’art. J’ai cannibalisé cette violence pour en faire des œuvres. Mes œuvres sont ma seule boussole dans mon existence.

Je reste un garçon poli mais l’auto censure me rongerait, m’oxyderait, me nécroserait. Depuis enfant j’irrite, j’urticant. Je suis né sous ce jour là, je suis né pour cet usage là. Ça ne s’arrache pas. J’ai bien essayé, j’en ai perdu toute capacité à respirer, tous mes flux internes ce sont transformés en humeurs maussades et nauséabonde.

L’auto censure, un mot voyou réclamé de toute part en démocratie - appuyez donc où ça fait mal -, en régime autocrate ou dictatorial… Bien sur, l’auto censure est du côté du dire et du (sur)vivre mais j’ai dû il y a bien longtemps tirer un trait dessus.

Je prétends ici cela alors que j’ai choisi de ne pas nommer. Oui. Ne pas nommer me permet de me livrer, sans livrer à la vindicte. Ne pas nommer aussi par soucis de sécurité pour les personnes concernées.

À SUIVRE : En 2024, j’ai été violemment censuré par l’une des plus grandes ambassades de France à l’étranger., avec pour argument que mon travail depuis 30 ans salissait l’image de la France. La conséquence : j’ai perdu un contrat sur 5 ans pour faire connaitre et imposer mon travail dans les plus grands musées de ce pays, l’une des plus grandes puissance de ce monde.

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