jean-françois boclé
I CAN('T) BREATHE

I CAN('T) BREATHE

Jean-François Boclé, I CAN('T) BREATHE, 2024, performance, 40’, 6 dancers-interpreters (Julien Boclé, Lilian Damango, Loïc Elice, Jade Lada, Yonas Pérou, Sofiane El Boukhari, choregraphy of Julien Boclé), 1 percussionist (Elisa Humanes, Ensemble Variances, composition of Thierry Pécou) Théâtre de la Ville - Sarah Bernhardt, Place du Châtelet, Paris, in the frame of Nuit Blanche Paris 24.©Jean-François Boclé/Adagp.


Jean-François Boclé, 
I CAN('T) BREATHE
, 2024, performance, 40’, 6 danseurs-interprètes (Julien Boclé, Lilian Damango, Loïc Elice, Jade Lada, Yonas Pérou, Sofiane El Boukhari, choregraphie de Julien Boclé), 1 percussioniste (Elisa Humanes, Ensemble Variances, composition de Thierry Pécou) Théâtre de la Ville - Sarah Bernhardt, Place du Châtelet, Paris, dans le cadre de Nuit Blanche Paris 24.©Jean-François Boclé/Adagp.




Dans le cadre de NUIT BLANCHE 24 PARIS sous la directrice artistique de Chaire Tancons assistée par David Démétrius, deux Guadeloupéens, la performance de Jean-François Boclé I CAN (‘T) BREATHE d’une durée de 40 mn prend place au THÉÂTRE DE LA VILLE - SARAH BERNHARDT Place du Châtelet.

Elle réunit trois artistes martiniquais qui (re-)donnent souffle au verbe du psychiatre, philosophe, et engagé politique anticolonial Frantz Fanon, mort algérien et né martiniquais.
Ces trois artistes sont le compositeur de musique contemporaine Thierry Pécou, le chorégraphe, danseur, auteur et comédien Julien Boclé et l’artiste visuel et auteur Jean-François Boclé.

Prématurément disparu en 1961 à l'âge de trente-six ans, Fanon a marqué des générations d'anticolonialistes, d'activistes des droits civiques et de spécialistes des études postcoloniales et décoloniales (ses publications : Peau noire, masques blancs, 1952 ; L'An V de la révolution algérienne, 1959 ; Les Damnés de la terre, 1961).

I CAN(‘T) BREATHE dit aussi les dernier mots de ces Africains-Américains assassinés par la police étatsunienne. JE NE PEUX PAS RESPIRER. Fanon nous invite en 1961 dans Les damnés de la terre à nous libérer de celui qui nous étouffe. Avec la libération de l’oppression vient la respiration. I CAN BREATHE. JE PEUX RESPIRER.

Pour certains, l’air est aujourd’hui irrespirable, empoisonné. Le continuum colonial est tenace. Le corps racisé est toujours l’objet de violences, I CAN(‘T) BREATHE en témoigne. Pensons à Adama Traoré, Théo Luhaka ou Claude Jean-Pierre en France, Éric Garner, George Floyd, Franck Tyson aux États-Unis.

Pour Jean-François Boclé, I CAN(‘T) BREATHE est autant dans la rupture que dans la continuité. Il collabore en effet avec Thierry Pécou depuis 2003. Ils avaient conçu un projet avec le pianiste Alexandre Tharaud sur la mémoire de l’esclavage colonial (Outre mémoire). Boclé a aussi déjà abordé plusieurs fois la pensée de Fanon dans son travail. S’il a déjà réalisé une performance avec un danseur en Martinique en février 2024, c’est par contre la première fois qu’il travaille avec un chorégraphe, c’est également une première collaboration avec son neveu, Julien Boclé.

La mise en scène et la chorégraphie ont été conçues pour un espace scénique à 360 degrés, visible du RDC et du premier étage (la courcive), plongeant ainsi le spectateur dans une œuvre immersive. Le public qui connait les textes de Fanon pourra lire dans la chorégraphie des concepts ou situation analysés par Fanon. Car Julien a construit son écriture chorégraphique à partir d’une lecture attentive de Peau noir masque blanc (1952), L’An V de la révolution algérienne (1959) et Les Damnés de la terre (1961). Il a été aussi important pour Jean-François Boclé d’offrir à tous les danseurs un exemplaire de Peau noir masque blanc et de Les Damnés de la terre.
La chorégraphie dira aussi le muscle et la respiration dans leur polysémie. Du côté du symptôme et du côté de son dépassement. Ces 6 danseurs seront également convoqués comme locuteurs. Julien Boclé étant le locuteur principal d’une pièce vocale polyphonique. Ils diront parfois de façon haletante des citations de Fanon. La résidence sera donc aussi l’espace temps d’une chorégraphie parlée.

Julien Boclé dira un texte écrit par Jean-François Boclé sur la question du muscle et de la respiration chez Fanon, des luttes de libération nationales à Franck Tyson, entrecoupé de citations de Fanon.

Jean-François Boclé et Julien Boclé sont en résidence tout le mois de mai avec les danseurs pour envisager ensemble les corps. Avec les danseurs Lilian Damango, Loïc Elice, Jade Lada, Yonas Pérou, Sofiane El Boukhari. Ces danseurs font partie des plus prometteurs de leur génération au niveau national (break dance, house, hip hop, danse contemporaine).

Lorsque Jean-François Boclé a proposé à Thierry Pécou cette nouvelle collaboration, Pécou a d’emblée eu l’intuition d’une pièce pour percussion seule. Une percussionniste, Elisa Humanes, fera vibrer un ensemble de percussion à peau. Cette pièce musicale de 30 minutes fera vibrer autant le muscle comme tension que comme libération, sera autant respiration combattante, qu’extinction du souffle (George Floyd).
Une pièce sonore de Jean-François Boclé interviendra dans la pièce de Pécou. Cette pièce de Boclé est un rythme agraire, lancinant et lent. Ce rythme qui dit la pénibilité autant que la détermination est intervenu dans une précédente performance, Tu appartiens au vent. L’artiste y est revêtu d’un Mas de carnaval conçu par lui, un Mas à bandelettes, courant dans les carnavals caribéens, aux couleurs de la banane et de ses monocultures d’exportation. En studio, il a enregistré un rythme réalisé à partir du Mas lui même (fait de bandelettes de papier de soie teintes en jaune) considéré comme un instrument. Ce rythme est celui de la chanson d’Eugène Mona (Martinique), Bwa Brilé.
(écouter ici : https://www.jeanfrancoisbocle.com/.../tu.../01.html).
Aussi, Boclé a proposé au compositeur d’inscrire sur sa partition des phrases écrites par lui comme APNÉE MUSICALE, LE COUTELAS SUR LA RÉTINE. Des coordonnées de pensée à l’attention de la percussionniste Elisa Humanes.
Le dispositif sera constitué de deux sets de percussions. Un au premier étage sur la coursive du Hall du Théâtre de la Ville - Sarah Bernhardt. L’autre au RDC. La percussionniste se déplacera de l’un à l’autre entre la première et la deuxième partie.

La Nuit Blanche est un événement majeur de la culture à Paris. C’est donc politiquement fort d’y inscrire une majorité d’artistes issus des territoires français non hexagonaux. Car nombre de générations d’artistes visuels de ces territoires ont été absenté de la scène artistique française. Inscrire un hommage à Frantz Fanon et faire retour sur le continuum colonial - par exemple, les violences policières - dans le cadre de Nuit Blanche, cet événement emblématique parisien, et dans l’un des lieux culturels emblématique de Paris - le Théâtre de la ville - Sarah Bernhardt, pensons à la musique, au théâtre et bien sur à la danse contemporaine - fais ô combien sens en 2024.

Thierry Pécou / Variances


Julien Boclé

haut de page top of page