jean-françois boclé
Si ton musée est mort, essaye le mien
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Si ton musée est mort, essaye le mien

Jean-François Boclé, Untitled, series Si ton musée est mort, essaye le mien, 2007-, installation, vitrines, objects collected by the artist since 20 years, variable dimensions, BildMuseet, solo show I Did Not Discover America, Umeå, Sweden, 2008. ©Jean-François Boclé /Adagp.

Jean-François Boclé, Sans titre, série Si ton musée est mort, essaye le mien, 2007-, installation, vitrines, objets collectés par l’artiste depuis 20 ans, dimensions variables, BildMuseet, exposition personnelle I Did Not Discover America, Umeå, Suède, 2008. ©Jean-François Boclé /Adagp.


SEE ALSO

> Parnassus Church, Ghent, Belgium, 2010
>
National Museum of Asian, African and American Cultures, Praha, Czech Republic, 2012
>
Royal Museum of Central AfricaTervuren, Belgium, 2011



[French below]

My Martinican grandfather, Prosecutor, Attorney General then Magistrate in Djibouti, Madagascar in Indochina (Vietnam and Cambodia), before ending his career at the Palais de Justice in Paris (La Conciergerie) as Senior Magistrate for good and loyal service - he applied the racialist  and colonial "Code de l'indigénat" – bequeathed me a collection of almost a thousand postcards. “Scenes and Types”, the cartography of a racialized and gendered humanity.

This legacy triggered the installation in 1997: "You are invited to come and tour the world" – slogan of the 1931 Colonial Exhibition in Paris. Ten years later, If your museum is dead, try mine (2007-) shows a collection of objects – collected over more than twenty years – arranged in showcases. Along with these artefacts from colonial history, historical fossils from all over the world (comic strips, advertising, ceramics, toys, chocolate pastries, etc.) mingle with discarded objects referring to archiving, filing, administration. Added to it are excerpts from my grandfather's collection of postcards and also shreds of my intimate geography, including photos from my childhood.

These postcards are covered with handwritten writings, a whole section of my family history dating back to the 1930s. This image of the world and the other constructed by a colonized person is representative of the iconographic propaganda of the colonizers. While Martiniquais Frantz Fanon* was writing Black Skin, White Masks in the 1950s, others were positioning themselves on another side of history. I am depositary of this. 

These showcases clash with those of ethnology museums. It seems that a child assembled these objects, there is an obsession mixed with the improbable. The title itself says playfulness or even cheekiness. This title, as I told it in one of the windows, appeared to me in the Château Rouge district, the black district of Paris: a poster stuck up proclaimed: “If your God is dead, try mine”. The poster invited passers-by to go to a temple to listen to the sermon of a Congolese pastor. This slogan is brilliant: you have Christianized us and now Nietzsche and Marx have deicidal tendencies... So we come to Christianize you in return.
With this museum, I invite the public to another visit: returned look, open to the scalpel. If your museum is dead try mine is the place of an intimate archeology to which I invite everyone.


* "Each generation must, in relative opacity, discover its mission, accomplish it or betray it". Frantz Fanon, 1961, The Damned of the Earth.









Mon grand père martiniquais, Procureur, Procureur général puis Magistrat à Djibouti, Madagascar en Indochine (Vietnam et Cambodge), avant de terminer sa carrière au Palais de Justice de Paris (La Conciergerie) comme Magistrat supérieur pour bon et loyaux services – il appliqua le code de l'indigénat – me légua une collection de près de mille cartes postales. Pour beaucoup des « Scènes et Types », la cartographie d'une humanité racisée et genrée.

Ce lègue enclencha en 1997 l'installation : Vous êtes invités à venir faire le tour du monde – slogan de l'Exposition coloniale de 1931. Dix ans après, Si ton musée est mort essaye le mien (2007-) donne à voir une collecte d’objets – rassemblée depuis plus une vingtaine d’années – disposés dans des vitrines. A ces artefacts de l’Histoire coloniale, des fossiles historiques provenant du monde entier (Bandes dessinées, publicité, céramiques, jouets, pâtisseries au chocolat...), se mêlent des objets de rebut renvoyant à l'archivage, au classement, à l’administration. S'y joignent des extraits de la collection de cartes postales par mon grand-père et aussi des lambeaux de ma géographie intime, entre autres des photos de mon enfance.

Ces cartes postales sont parcourus d’écrits manuscrits, tout un pan de mon histoire familiale remontant aux années 1930. Cette image du monde et de l'autre construite par un colonisé est représentative des propagandes iconographiques des colonisateurs. Pendant que le Martiniquais Frantz Fanon* écrivait Peau noire, masques blancs dans les années 1950, d'autres se positionnaient sur un autre versant de l'Histoire. Je suis dépositaire de cela.

Ces vitrines dissonent avec celles des musées d'ethnologie. Il semblerait qu'un enfant a assemblé ces objets, il y a là de l'obsessionnel mêlé à de l'improbable. Le titre lui même dit l'espièglerie ou même l'effronterie. Ce titre comme j'en fait récit dans l'une des vitrine m'est apparu dans le quartier de château Rouge, le quartier noir de Paris : une affiche collée proclamait : « Si ton Dieu est mort, essaye le mien ». L'affiche invitait les passant à se rendre dans un temple pour écouter le sermon d'un pasteur congolais. Ce slogan est brillant : vous nous avez christianisé et voilà que Nietzsche et Marx ont des velléités déicides... Alors nous venons vous christianiser en retour.
Avec ce musée, j'invite le public à une autre visite : regard défait, retourné, ouvert au scalpel. Si ton musée est mort essaye le mien est le lieu d’une archéologie intime à laquelle je convie chacun.

* "Chaque génération doit, dans une relative opacité, découvrir sa mission, l'accomplir ou la trahir". Frantz Fanon, 1961, Les Damnés de la Terre.
 

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