jean-françois boclé
Craie blanche sur fond noir

Craie blanche sur fond noir

French below

Untitled, Craie blanche sur fond noir series (White chalk on black field), 2018, black paint for school chalkboards on canvas, white chalk (Treaty of Paris, 1898), 81 x 65 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie.

Untitled, Craie blanche sur fond noir series (White chalk on black field), 2018, black paint for school chalkboards on canvas, white chalk (Treaty of Utrecht, 1713), 40 x 40 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie.

Untitled, Craie blanche sur fond noir series (White chalk on black field), 2018, black paint for school chalkboards on canvas, white chalk (Treaty of Tordesillas, 1494), 195 x 130 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie.


Jean-François Boclé creates here what one might describe as a system of black boxes, or, more specifically, a series of opaque hotbeds of power that operate continuously within the element of history. Boclé revisits the legal-political treaties, the strategic alliances that confi- gured the world of sovereignties in which we live: the Treaty of Tordessillas, for instance, signed on 7 June 1494 under the auspices of the papacy, attributing control of half the planet to Portugal and Spain. Or, for example, the Treaties of Sèvres (1920), Paris (1898), and Utrecht (1713). We ultimately in substance know very little about how the negotiations crystallized, aside from their subsequent effects and their irreversible nature. The artist’s undertaking subtlety occupies and transforms the space of historic matter’s still active subjacent vibrations. The past hasn’t passed; or, in other words, history is not seen as a teleo- logical and linear succession, but rather as a series of contingent acts superposed in layers that press the tensions of the global chaos-world.

For the Craie blanche sur fond noir series (White Chalk on Black Field, 2018), the artist painted three canvases of varying sizes, then re-transcribed each of the treaties in white chalk over several days, or even weeks. Boclé wrote non-stop, erasing nothing, until he could physically no more, suffering extreme muscle cramps, inflammation, and scorched skin; until his eyes were exhausted too, blinded by the surface of the canvases as they became covered in white chalk. From this, abstract images emerge, produced by the superpositions of words; monochrome white on a black background, reminiscent of the spiritual journey of Malevitch. From a symbolical point of view, this process of abstracting the now-illegible treaties prefigures a regime of visibility that captures utterances. Here, this transformative cannibalizing operation reverses the power of enunciation. A space opens at the core of the body’s exhaustion, traversed by the violence of carving up the world; a space in which a gaze stripped of its sedimentation is constructed to see at last. “A seeing unseeing”, as Boclé describes it.

Mirna Boyadjian 







Sans titre, série Craie blanche sur fond noir, 2018, peinture noire pour tableau d'école sur toile, craie blanche (Traité de Paris, 1898), 81 x 65 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie. 

Sans titre, série Craie blanche sur fond noir, 2018, peinture noire pour tableau d'école sur toile, craie blanche  (Traité d'Utrecht, 1713), 40 x 40 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie.

Sans titre, série Craie blanche sur fond noir, 2018, peinture noire pour tableau d'école sur toile, craie blanche  (Traité de Tordesillas, 1494), 195 x 130 x 2 cm, solo show Monochrome-moi, Maëlle Galerie, Paris, 2018. ©Jean-François Boclé/Adagp ; photo : ©Jérôme Michel, Courtesy Maëlle Galerie.


Jean-François Boclé matérialise ici ce qu’on pourrait nommer un réseau de boîtes noires, plus précisément une série de foyers opaques de pouvoir qui agissent en continu dans l’élément de l’histoire. Les accords juridico-politiques, ces alliances stratégiques que revisite Boclé, ont configuré le monde des souverainetés dans lequel nous vivons. Prenons le traité de Tordessillas signé le 7 juin 1494 sous l’égide papale. Il attribuait au Portugal ainsi qu’à l’Espagne le contrôle sur une moitié de la planète. Ou encore les traités de Sèvres (1920), de Paris (1898), d’Utrecht (1713), etc. En substance, on en sait finalement très peu sur comment ces négociations se sont cristallisées, sinon par leurs effets subsé- quents, leur caractère irréversible. Avec subtilité, les gestes de l’artiste occupent et transforment l’espace des vibrations souterraines, toujours actives, de la matière historique. Le passé ne passe pas, c’est-à-dire que l’histoire ne s’envisage pas comme une succession téléologique et linéaire, mais plutôt comme une série d’actes contingents qui se superposent en strates où se pressent la tension du chaos-monde global.

Pour la série Craie blanche sur fond noir (2018), l’artiste a peint de noir trois toiles de format varié ainsi qu’un mur de la galerie avant de retranscrire chacun des traités à la craie blanche durant plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Boclé a écrit sans relâche, sans passer l’éponge, jusqu’à l’épuisement de ses membres; contraction extrême des muscles, inflammations, brûlures de la peau. Épuisement aussi du regard aveuglé par la surface des tableaux qui se recouvre de la blancheur de la craie. Il en résulte des images abstraites produites par superposition de mots ; monochrome blanc sur fond noir, évoquant l’aven- ture spirituelle de Malevitch. D’un point de vue symbolique, ce processus d’abstraction des traités, deve- nus illisibles, préfigure un régime de visibilité qui capture des énoncés. Cette opération cannibalisante, transformatrice, renverse ici le pouvoir d’énonciation. Un espace se déploie au cœur de l’épuisement du corps traversé par la violence des découpes du monde où s’édifie un regard dépouillé de sa sédimentation pour enfin voir. « Une non-voyance qui voit » pour le dire comme Boclé.

Mirna Boyadjian 




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